Concours des villes fleuries : question d'envie et de budget 03/11/2013
Les villages de Mureaumont et Rémérangles ont chacun conservé leurs quatre fleurs. Le premier végète, le second dépense. Le palmarès des villes fleuries perd de son sens. La commune de Mureaumont, 150 habitants, bien que titulaire de quatre fleurs, n'a plus les moyens financiers d'assumer son statut. Les bénévoles d'hier ont pris de l'âge ou quitté le village. Quatre fleurs : c'est désormais le seul point commun entre Mureaumont et Rémérangles. Les deux seules communes isariennes à justifier de quatre fleurs au concours des villes et villages fleuris dans la catégorie des communes de moins de 1000 habitants. Car derrière la distinction, se cachent deux trajectoires sensiblement opposées, deux situations radicalement différentes. Et un classement qui ne veut plus dire grand-chose... Mureaumont d'abord, village de 150 habitants situé dans le canton de Songeons. Depuis 2010 et la mise en sommeil du comité local d'embellissement, faute de bénévoles - qui ont pris de l'âge ou ont quitté le village - la commune entretient, à raison de 1 500 à 2 000 euros par an. Un point c'est tout. Le village n'a pas les moyens de suppléer ces bénévoles. Le village a donc limité ses efforts, au risque assumé de perdre une fleur lors du prochain passage du jury en 2014. Un jury qui a fondé le classement 2013 de Mureaumont sur la base d'une visite réalisée... en 2010. Parce qu'il ne parvient pas à faire face au nombre croissant de villages candidats. Mais ce comité ignore sans doute que la situation a bien changé en trois ans à Mureaumont. La taille des massifs, la tonte de la pelouse, « tout cela prend au moins 30% » du temps du seul agent communal employé à mi-temps. Et l'employer à plein temps : « Nous y avons songé, mais c'est impossible », affirme le maire, Alain Degry. Le budget communal - 100 000 euros par an - est trop serré, bientôt grevé par un projet de réfection de la toiture de la mairie. « Si nous devions poursuivre le fleurissement, comme l'ancien maire pouvait le faire, nous devrions augmenter les impôts », poursuit le maire, « les habitants ne seraient pas d'accord ». Confirmation dans la rue principale du village : « Pour des fleurs, je dirais non », lâche un administré. Les éoliennes font pousser les fleurs À Rémérangles en revanche, le village est sur une pente ascendante, titulaire de quatre fleurs « depuis une quinzaine d'années ». Le village de seulement 229 habitants, situé dans le canton de Clermont, s'est lancé dans le fleurissement dans les années 1960 et s'est « pris au jeu ». Aujourd'hui, la commune emploie deux agents, parce que « le seul entretien des fleurs nécessite un équivalent temps plein », poursuit Hubert Proot, le maire. Et investit 6 000 à 7 000 euros chaque année dans le renouvellement des fleurs. Le jury a fondé son classement sur la base d'une visite réalisée... en juillet dernier. À la différence de Mureaumont, le village a les moyens : dix éoliennes érigées il y a cinq ans sur le territoire de la commune permettent au village de dépenser sans compter, sans augmenter les impôts. « Il y avait des fleurs avant les éoliennes », tempère le maire. Mais la manne financière tirée des éoliennes permet d'investir bien plus librement - dans la restauration de l'église actuellement - et donc de continuer à fleurir le village. La commune bénéficie des retombées fiscales liées à la présence de deux entreprises sur le territoire, quand Mureaumont doit se contenter d'une poignée d'agriculteurs. À Rémérangles, le budget de fonctionnement est bien supérieur à celui de la petite commune de Mureaumont. Ironie de l'histoire, un cadre de vie fleuri se paye donc, en partie parfois avec des éoliennes. Mais ça, le classement des villes et villages fleuris ne le dit pas... MATTHIEU HÉRAULT
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